Parler de la fin de vie et anticiper ses souhaits est une démarche intime, souvent difficile à aborder. Il n’existe pas de moment parfait, mais plusieurs signaux peuvent indiquer qu’il est temps d’envisager cette discussion.
Le bon moment : quand commencer à parler de sa fin de vie ?
Lorsque l’état de santé se dégrade.
En tant qu’équipe de soutien de 2ème ligne soins palliatifs, nos infirmières et médecins constatent que la planification anticipée des soins est très souvent abordée pour la 1ère fois lorsqu’un patient se trouve confronté à une situation de santé complexe ou fragile, par exemple :
* Lors du diagnostic d’une maladie chronique ou grave
Lorsque le patient reçoit le diagnostic d’une maladie incurable, dégénérative, ou nécessitant des soins à long terme (cancer, insuffisance cardiaque, maladie de Parkinson, etc.), il est important de commencer à réfléchir aux soins futurs. L’ACP permet d’anticiper les décisions médicales à un stade où la personne est encore capable de s’exprimer.
* En cas de déclin fonctionnel
Le vieillissement, surtout lorsqu’il est associé à des maladies chroniques ou une perte d’autonomie, est un moment clé pour entamer la discussion. Il permet de réfléchir aux soins en cas d’aggravation de l’état de santé.
* Après une hospitalisation lourde
Une hospitalisation liée à un problème de santé grave ou une urgence médicale (comme un infarctus ou un accident vasculaire cérébral) constitue une occasion naturelle d’aborder le sujet des soins de santé futurs.
Lors de changements de traitement
Si une maladie progresse au point où les traitements doivent être modifiés, ou lorsque les traitements curatifs ne sont plus efficaces, c’est un bon moment pour discuter des options de soins palliatifs et des souhaits de fin de vie.
En phase de rémission ou d’accalmie :
Paradoxalement, la rémission d’une maladie grave ou une période stable peut offrir une opportunité de discussion en dehors de l’urgence, lorsque les émotions sont plus contrôlées et la réflexion plus sereine.
Lors de l’expression de préoccupations et d’angoisses :
Si le patient commence à parler de ses craintes par rapport à la maladie, à la mort, ou à la façon dont il souhaite être pris en charge en cas de complications, c’est un indicateur clair qu’il est prêt à en discuter.
Anticiper …. lorsque tout va bien
Si la dégradation physique (et/ou psychologique) du patient en fin de vie est un moment clairement identifié comme idéal pour anticiper certains aspects de la fin de vie, aborder la question de la fin de vie en amont, même lorsqu’on est jeune et en bonne santé, est une démarche préventive qui peut apporter de nombreux avantages.
Cela permet de réfléchir en toute sérénité à ses souhaits, de garantir le respect de ses volontés et d’éviter des décisions prises dans l’urgence.
C’est aussi une façon de soulager les proches, d’assurer une autonomie continue et de vivre avec plus de conscience et de clarté quant à ce qui compte vraiment.
Voici pourquoi il est intéressant d’y penser plus tôt et d’initier ce dialogue dès que possible :
* Anticiper l’imprévu
Bien que nous associons souvent l’Advance Care Planning (ACP) à la vieillesse ou à des maladies graves, la réalité est que des situations imprévues peuvent survenir à tout âge (accidents, maladies soudaines). Anticiper ses souhaits avant qu’une urgence médicale n’éclate permet de prendre des décisions éclairées sans être sous pression. Cela garantit que, quelles que soient les circonstances, les volontés de la personne seront respectées.
* Conserver le contrôle et l’autonomie
L’ACP permet d’assurer que ses choix sont respectés même en cas de perte de capacité de communication ou de conscience. En initiant ce processus quand on est en bonne santé et pleinement conscient de ses choix, on prend des décisions de manière réfléchie et sereine, sans influence de la peur ou du stress. Cela permet de conserver son autonomie dans des situations où l’on ne pourrait plus exprimer ses volontés directement. Disposer d’un Advance Care Planning bien documenté, même en étant jeune, peut également aider dans des situations juridiques ou médicales complexes
* Alléger la charge émotionnelle des proches
Aborder le sujet de la fin de vie tôt dans la vie permet aussi d’alléger la charge émotionnelle que portent les proches lorsqu’ils doivent prendre des décisions médicales en urgence. Lorsque les souhaits sont clairs et documentés, les proches n’ont pas à deviner ce que la personne aurait voulu. Ils peuvent ainsi être assurés de respecter ses volontés, ce qui réduit les conflits familiaux potentiels et les sentiments de culpabilité.
* Un processus évolutif et flexible
La discussion sur la fin de vie, commencée en amont, n’est pas figée. Elle peut évoluer au fil du temps , à mesure que la situation personnelle ou la perception des soins change. En abordant le sujet tôt, on se donne la possibilité de revenir régulièrement sur ses décisions pour les ajuster en fonction de l’évolution de ses valeurs, de ses priorités ou de son état de santé. Cela garantit que les souhaits reflètent toujours la réalité du moment.
* Diminuer l’angoisse face à la mort
Parler de la fin de vie en bonne santé peut paraître contre-intuitif, mais cela peut en réalité aider à diminuer l’angoisse liée à la mort et de désamorcer les peurs en rendant la fin de vie moins taboue.
* Profiter de l’instant présent
Curieusement, parler de la fin de vie peut avoir un impact positif sur la façon dont on vit le moment présent. Réfléchir à ses souhaits pour la fin de vie peut amener à se concentrer sur ce qui est vraiment important dans le quotidien et à mieux valoriser les relations et les expériences. Cela permet de vivre avec plus de conscience et d’intention, en prenant des décisions plus alignées avec ses valeurs.
L’ACP : une pratique de plus en plus encouragée
De plus en plus de professionnels de santé, de psychologues et d’éthiciens encouragent l’approche préventive de l’ACP, même chez les jeunes adultes en bonne santé.
Convaincue de tous les avantages à l’anticipation de la fin de vie, énumérés ci-dessus, l’équipe de PalliaNam (grâce au soutien des financements MUSM) a investi depuis quelques années le champ de l’anticipation de la fin de vie et ce, à travers plusieurs projets :
- Des ateliers grand public « Penser plus tôt à plus tard »
- Des séances de sensibilisation et d’informations sur les directives anticipées, pour les particuliers, professionnels ou agents communaux
- La diffusion et sensibilisation à l’utilisation des outils d’anticipation tels que le PSPA et le PAVS
- Des temps d’information et des ateliers animés avec l’outil « A Vrai Dire »
- La participation aux Cafés Mortels
Afin de vous aider à réfléchir à vos souhaits de fin de vie ; à les exprimer ensuite et à vous assurer qu’ils seront transmis et pris en compte le moment venu, il existe donc différents outils en Belgique qui peuvent faciliter la prise en compte et le respect de vos souhaits le moment venu.
Par ailleurs, une récente révision de la nomenclature rend ce système de soins plus accessible, en introduisant notamment des avancées dans le remboursement et la classification des patients en soins palliatifs.